Wasichu

Wašíču est le terme sioux qui désigne les non-Indiens. Ce terme péjoratif ne fait pas allusion à une race ou à une couleur de peau mais à un rapport à la terre et aux Indiens. Il atteste une étrangeté à la terre, fruit d'une enclosure puis d'une prolétarisation.

L'enclosure, en privatisant les terres en a interdit l'usage, la connaissance et l'intimité à tous ceux qui n'étaient pas propriétaires terriens. Les propriétaires terriens sont aussi devenus étrangers à la terre puisque, jouissant de la propriété lucrative de leurs terres, ils les ont exploités comme des sources de revenus sans plus les écouter, les habiter.

La prolétarisation a privatisé l'acte, le faire, le produire - aussi bien social que concret - et, pour ceux qui étaient exclus de l'usufruit de l'acte, de sa propriété d'usage, elle les a, de la même façon, privés de l'usage de la connaissance et de l'intimité de leurs propres actes. En ce sens, on peut parler du couple emploi-enclosure comme d'une institution bicéphale propre à nous aliéner, propre à nous rendre étrangers à notre propre nature, à notre propre force de vie, à nos propres désirs.

Une étrangeté aux Indiens devenus pour le wasichu incompréhensibles. L'étrangeté du wasichu aux Indiens et à la terre est une étrangeté à soi-même, à sa propre nature humaine.

À l'accaparement brutal des terres a succédé la société des parcs d'attraction. Les Indiens sont considérés par les wasichu comme des curiosités amusantes, des restes curieux de civilisations incompréhensibles.

Pourtant, il nous arrive dans notre combat contre l'emploi, pour la civilisation de nous sentir infiniment plus proche des Indiens que des wasichu. Question de perspective sans doute.