- 1. L'assurance privée
L'essentiel de l'assurance santé est le fruit de contrats privés entre des compagnies privées et des particuliers. Ceci pose quelques problèmes
- seuls les gros revenus peuvent se payer des assurances santés valablesUn petit tiers des soins de santé est couvert par la sécurité sociale (Medicaid et Medicare, voir ci-dessous) et deux tiers sont (très mal) couverts par les assurances privées lucratives.
- le coût des assurances santé privées est très élevés puisqu'elles prélèvent des commissions considérables
- sous des atours modernes et compliqués, ce système équivaut à la boîte à chaussure. Quand on des sous, on les met dans une boîte à chaussure (un peu complexe puisqu'il s'agit d'une compagnie de mutualisation des boîtes à chaussure); quand on a des problèmes, on est indemnisés à hauteur de ce qu'on a payé auparavant (comme la boîte à chaussure).
- les prestations sont soumises à des conditions draconiennes, des contrats léonins privent des malades de légitimes remboursements
- seuls les soins de santé sont couverts, les indemnités maladies n'existent pas; la maladie est toujours synonyme de pauvreté, de misère
Les surcoûts des médicaments et des prestations privées rendent la santé américaine une des plus chères du monde (près de 2.800 milliards de $ ou 2150 milliards €, 17,1% du PIB) pour des performances très moyennes.
- 2. Logique d'assurance
Cette branche très faible en importance de la sécurité sociale s'inscrit pourtant dans un modèle bismarkien à l'instar de la sécurité sociale française ou belge.
- L'assurance chômage (...) est financée par une cotisation patronale dans les entreprises de plus de 3 salariés. En 1999, le montant versé est faible : 85 % du seuil de pauvreté d'un foyer de 3 personnes (soit 215 $ environ par semaine).
De nouveau, les pensions, l'invalidité, l'assurance décès et veuvage s'inscrivent beaucoup plus dans des modèles bismarkiens (comme la France) puisqu'ils reposent sur des cotisations. Mais les prestations sociales ne sont accessibles qu'aux producteurs qui ont des patrons qui cotisent - ce qui explique le nombre extrêmement élevé d'États-uniens sans assurance santé ou sans assurance retraite. Les prestations sont égalemente très faibles en importance et font l'objet de luttes sociales actuellement très dures tant contre (les républicains, les libertairiens, le mouvement du Tea Party, etc.) que pour (une mobilisation des employés sur ces sujets, de l'aile gauche des démocrates et de la société civile se fait jour).
- L'assurance vieillesse, décès et veuvage pour les salariés (...) est mise en place en 1939, puis étendue à l'invalidité (1953) et à la Santé (1966) pour les assurés âgés avec le « medicare ». Les dispositions de retraite de base sont assez comparables au système français (principe de la répartition, cotisation partagée entre employeur et salarié, pension proportionnelle au salaire d'activité avec plafond…). L'âge ouvrant droit à pension au taux plein (65ans) est relevé pour atteindre 67 ans en 2027.
Ces retraites par contre qu'on nommerait 'deuxième' ou 'troisième' pilier sont par contre inscrites dans le système moyen-âgeux de la boîte à chaussure. Ceux qui ont, mettent dans la boîte pour leurs vieux jours, ceux qui n'ont pas ne mettent rien et n'auront toujours rien pour leurs vieux jours. Ce système passe par des compagnies privées qui, entre les primes et les prestations, se prennent des marges somptueuses - comme si les boîtes à chaussure étaient trouées.
- Les retraites complémentaires sont facultatives et relèvent soit d'un effort personnel d'épargne, soit du fait des entreprises qui l'organisent de façon discrétionnaire . On estime qu'environ la moitié des salariés dispose d'une retraite complémentaire.
Ce système est surtout payé par les contribuables depuis les reaganomics.
- Medicare : Système assuranciel obligatoire pour tous les salariés, créé en 1965, financé par cotisation égale de l'employeur et du salarié (1,45 % chacun). Les ayants droit doivent avoir 10 années de travail et de cotisation pour percevoir les prestations sans considération de revenu, à partir de 65 ans ou en cas d'incapacité permanente.
Le programme Medicare a coûté 256,8 milliards de dollars [moins de 200 milliards €, 1,6 du PIB] : 230,9 milliards ont été financés par le gouvernement.
- 2. Logique d'assistance
Il existe également une sécurité sociale aux États-Unis sur le modèle béveridgien d'assistance aux démunis. Ce type de sécurité sociale est dépendant du bon vouloir du monde politique fort inféodé aux intérêts des grands industriels.
On peut citer l'aide aux enfants dépendants, l'assistance temporaire aux familles dans le besoin, les aides aux logements (qui existent aussi en France) et les bons alimentaires qui sont versés à des personnes indigentes dans l'incapacité de travailler. Les producteurs hors de l'emploi n'ont accès à aucune prestation de ce type.
Depuis les années 60, on observe un financement des dépenses de santé qui pèse de plus en plus sur le contribuable (type beveridge) et de moins en moins sur les entreprises (modèle bismark).
Budget Medicaid en 2008 (estimation): 295 milliards $ (227 milliards € 1,9% PIB).
- Medicaid: destiné aux enfants mais aussi à certaines dépenses des plus de 65 ans et des handicapés dépourvus de ressources. Le système propose la seule gratuité des soins à l'exclusion de toute autre prestation.
- 3. La guerre au salaire
Vous pouvez trouver l'article que nous résumons in extenso sur le site de l'Ires, ici.
Les salaires états-uniens stagnent depuis 1970 (à l'exception de la seconde moitié des années 1990). Depuis 1980, les syndicats ont accepté les baisses de salaire au nom de l'emploi. Ils ont également accepté la dégradation des conditions de travail au nom de l'emploi, au nom du chantage au chômage, c'est ce qu'on appelle le concession bargaining.
Depuis 1973, les salaires ont décroché par rapport à la productivité qui a, elle, continué à augmenter.
Image extraite de l'article de l'Ires |
Ceci a fait exploser les inégalités salariales et a fait perdre globalement 6% du PIB aux salaires au profit des dividendes des actionnaires.
La parenthèse de contrôle des prix et des salaires ouverte par Roosevelt s'est achevée en 1981 avec Reagan.
Le Concession Bargaining est amené par la pression de la concurrence étrangère
de nombreuses concessions sont obtenues par les employeurs, que les syndicats, cédant "aux sirènes de la compétitivité" acceptent en contrepartie de mesures destinées à sécuriser l'emploi ou à renforcer leur rôle dans les entreprises.Des gels de salaires se répandent, puis des réductions. Une partie du salaire est intégrée dans des primes ce qui permet de réduire l'assiette de cotisation (et donc la qualité des prestations sociales) et laisse inchangée l'échelle des salaires.
Les employeurs introduisent une grille salariale à deux vitesses: les derniers venus touchent des salaires moindres.
Depuis les années 1990, ce sont les compléments de salaires qui disparaissent à leur tour, les primes, les avantages en nature, etc.
Les salaires horaires minimum diminuent depuis la crise de 2008 en dollars constants.
Les fonctionnaires sont à leur tour touchés par le concession bargaining du fait de l'état des finances publiques.
La stagnation des salaires a poussé les ménages à s'endetter pour conserver leur train de vie. Comme les salaires n'augmentaient toujours pas, ces dettes sont devenues ou vont devenir progressivement insolvables, ce qui ne manquera pas de provoquer d'autres crises. Cette spirale infernale risque d'affecter la maigre part socialisée des salaires, le medicare et le medicaid.
- 4. Enjeux actuels
Les républicains depuis Reagan souhaitent diminuer les cotisations des entreprises, ce qui tournerait les salariés vers un modèle beveridgien aux prestations très faibles et vers un modèle de prévoyance privée (la boîte à chaussure) et l'aile gauche des démocrates souhaite au contraire étendre le filet de protection sociale à celles et ceux qui en sont exclus.
C'est le sens de la réforme dite de l'Obamacare, de l'extension du Medicaid aux catégories de la population qui en sont exclues, contre laquelle le Congrès républicain se bat bec et ongles. Dans le même esprit, le congrès républicain veut abolir les bons alimentaires. Ces mesures insignifiantes au niveau budgétaire protègent un tout petit peu, par contre, les gens des rets de l'emploi à tout prix (voir ici).