- Service public et fonction publique
Avant toute chose, ne confondons pas le service public et la fonction publique.
Le service public insiste sur le travail concret, sur les prestations, sur la qualité des services rendus au client-usager. Cet angle d'analyse se concentre sur l'offre à l'instar des malheureuses politiques d'austérité. Puisque le service doit être presté dans les meilleures conditions, il faut justifier de l'utilité du travail des prestataires et économiser les coûts pour satisfaire le client-usager. Le piège idéologique se referme alors sur travailleurs qu'on aura tôt fait de désigner comme des "privilégiés". Après tout, construire des maisons, des routes, nettoyer des usines ou soigner des personnes âgées, par exemple, c'est aussi fort utile et on ne voit pas pourquoi les travailleurs de service public seraient mieux traités que les autres.
Il importe donc de parler de fonction publique et de revendiquer l'universalisation de cette fonction publique à tous, à toutes et à tout comme droit économique. La fonction publique est la production de valeur économique des travailleurs à statut de fonctionnaire. Ces travailleurs n'ont pas d'employeur, ne sont pas payés à la tâche ou au poste. C'est leur qualification qui est salariée et cela rend leur production de valeur économique révolutionnaire. En travaillant, les fonctionnaires ne valorisent pas de capital, ils n'enrichissent pas de propriétaire, ils se concentrent sur ce qu'ils aiment faire et sur ce qu'ils savent faire.
Le discours qui stigmatise les fonctionnaires comme des coûts est une aberration économique puisque les salaires des fonctionnaires créent de la valeur ajoutée à l'instar de tous les salaires. Mais se concentrer sur l'indéniable utilité des professeurs, des infirmières ou de l'inspection du travail est un piège puisque, ce faisant, on recadre le problème sur la question du travail concret et on se retrouve dans les rets du service public. C'est bel et bien la nature, le mode de fonctionnement et de production, du travail débarrassé d'actionnaire qu'il faut défendre et étendre.
- Les politiques stigmatisent la fonction publique pour la précariser
Le Soir nous signale par une brève (ici)
que les agents de la fonction publique statutaires sont remplacés par
des employés "comme les autres", précaires, corvéables, jetables.
C'est bien sûr un des aspects de la gigantesque guerre contre les salaires en cours. Les fonctionnaires jouissent d'un salaire à vie en fonction de leur qualification personnelle. Ils se montrent consciencieux, compétents, honnêtes, créatifs, soucieux du travail bien fait. À l'occasion de conflits socio-politiques, ils se montrent combatifs, organisés, déterminés, solidaires et courageux.
C'est bien sûr un des aspects de la gigantesque guerre contre les salaires en cours. Les fonctionnaires jouissent d'un salaire à vie en fonction de leur qualification personnelle. Ils se montrent consciencieux, compétents, honnêtes, créatifs, soucieux du travail bien fait. À l'occasion de conflits socio-politiques, ils se montrent combatifs, organisés, déterminés, solidaires et courageux.
Toutes
ces qualités sont incompatibles avec l'emploi. Ou, pour le dire
autrement, c'est parce que les qualités des fonctionnaires sont
incompatibles avec l'emploi qu'on les met en emploi. On les prive de
leurs qualités pour en faire des machines résignées et terrorisées, des
machines à faire des profits pour les actionnaires.
Tableau sur la politique de diminution du nombre de fonctionnaires en France. Politique couronnée de succès: c'est la crise depuis 2008 et le chômage est à son plus haut. |
Chez Belgacom, les statutaires sont déjà minoritaires. Ils ne pèsent plus que 42 %. Idem à la RTBF où la barre des 50 % a été franchie il y a un an. Aujourd’hui, ils représentent 45 % des effectifs.
Bpost s’apprête à les rejoindre. Ce phénomène est appelé à se poursuivre.
Tous les nouveaux travailleurs sont engagés via un contrat de travail classique. Les statutaires étant les plus âgés de l’entreprise, leur nombre s’érode naturellement chaque année avec les départs à la pension.
Sur les fonctionnaires, voici un texte glané sur facebook, écrit par Yvan Perez, un ami français.
C'est insupportable d'entendre affirmer à longueur de journée (et même sur le service public) que la fonction publique est une "charge", que les fonctionnaires "dépensent mais ne produisent rien"... C'est le discours qui est tenu dans le fond. Faut-il donc rappeler aux prétendus experts qui font passer ces salariés pour des "privilégiés" que le travail des fonctionnaires - c'est à dire la valeur économique produite et mesurée à travers leurs qualifications - est comptabilisée dans la production du PIB depuis le milieu des années 70 ?!
En 2013, les administrations publiques ont contribué au PIB à hauteur de 354 milliards d'euros (chiffres INSEE - comptes base 2010, pas très difficile à vérifier). Pourquoi ne pas le signaler pour bien poser le débat ? Comment peut-on laisser affirmer à l'antenne que "les fonctionnaires coûtent trop cher" sans préciser qu'ils produisent également ? Comment croire ceux qui affirment - sans savoir de quoi ils parlent finalement - que la fonction publique ne peut pas être financée et que les fonctionnaires ne produisent rien, qu'ils sont une "charge" sur l'économie alors que même l'INSEE indique dans tous ses chiffres que la fonction publique participe à la production du PIB, et ce depuis plusieurs décennies maintenant ?
Il est nécessaire d'apporter une objection je crois : un fonctionnaire ne dépense pas plus qu'un autre salarié, et si on compte uniquement en dépenses sans parler des recettes, alors il faut aussi rappeler que TOUS les salariés dépensent, ceux du public comme ceux du privé, bien évidemment. Et ces effets de langage qui tendent à faire passer les fonctionnaires pour "une dépense insoutenable en temps de crise" sont le fruit d'une idéologie qu'il faut dénoncer et pouvoir contredire, sinon la démocratie n'existe plus et il n'y a plus que les vérités déclarées qui comptent.
[Il faudrait] pourtant être apte à défendre ces salariés (du public) et leurs qualifications personnelles sans tomber dans le piège de son interlocuteur, sans opposer ainsi le privé et le public, sans opposer les employés aux fonctionnaires qui seraient dépendant de l'emploi, ce qui est totalement faux. Ils sont dépendants (pour leur salaire) du secteur marchand comme tout le monde, puisque c'est là que se concentre toute la monnaie, mais pour autant le secteur non marchand produit lui aussi de la valeur... Et ce qu'on observe dans l'impôt n'est pas un flux de valeur mais seulement un flux de monnaie !
Loin des vérités déclarées (...) la réalité est que les fonctionnaires, comme les employés dans le privé, participent à la production du PIB. Moins de fonctionnaires c'est donc moins de PIB (austérité = dépression) sauf si on transforme leurs activités en emploi à la place, en transformant ainsi la fonction publique en marché du travail, les postes des fonctionnaires en emploi. Et c'est bien ça le rêve de la classe capitaliste qui ne supporte pas l'idée que des gens puissent travailler et produire sans mettre en valeur aucun capital pour des actionnaires (car pour le capitalisme il est important de nier l'humain en tant que producteur, le réduisant alors à un simple consommateur, à une marchandise - une ressource - devant se vendre sur un marché où viennent se servir les propriétaires lucratifs, les actionnaires et autres investisseurs qui sont les vrais employeurs au fond, c'est à dire ceux qui décident de ce qui est investi ou pas, de qui travaille ou pas, de ce qu'on produit ou pas).