Féodalité

  • Histoire

La féodalité a organisé l'Europe du Xe au XIIe siècle. La violence sociale reposait sur des liens personnels entre le suzerain et le vassal. Le suzerain devait protection à son vassal et le vassal devait obéissance, soumission au suzerain. 

Les liens entre les intéressés étaient manifestement hiérarchiques. Le vassal devait prêter allégeance à son suzerain lors de la cérémonie d'adoubement (voir l'image ci-dessous).

Au XIIe siècle, la société féodale a peu à peu cédé le pas à la chevalerie. Par la suite, la société chevaleresque devait disparaître au profit de la noblesse. Elle devait être maîtrisée par le centralisme royal, lui-même aboli par la révolution bourgeoise, par le capitalisme.

  • Féodalité et capitalisme
Les capitalistes considèrent que ce sont les propriétaires lucratifs qui produisent la valeur économique. Si l'on suit cette logique, dans une société féodale, celui qui produit les récoltes, la richesse des nations, ce n'est pas le serf paysan, c'est le noble.

La thèse capitaliste s'oppose aux références libérales elles-mêmes, pour Ricardo, pour Smith (et pour Marx), la source de la richesse, c'est ... le travail.

Ceci nous amène à distinguer le libéralisme du capitalisme. Alors que le libéralisme prône le laisser-faire économique, le capitalisme exige l'universalisation de la propriété lucrative et de la rareté qui la permet.

Alors que le libéralisme peut prétendre rêver de liberté, le capitalisme entend mettre les ressources communes sous la coupe de propriétaires lucratifs et ne reconnaît comme source de richesse que cette seule forme de propriété.

Pour asseoir son ordre injuste socialement et inefficace économiquement, le capitalisme raconte des histoires comme celle de l'homo œconomicus, il s'adonne à l'anthropologie de bazar et aux pseudo-sciences financières.

Philosophiquement, il s'agit en tout cas toujours, pour un capitaliste, de justifier la gestion de l'humanité par des forces extérieures aux humains gérés. De la même façon, l'ordre divin justifiait la domination féodale et masquait la violence militaire qui en était la source.


  • Féodalité et emploi

Alors que dans la féodalité le lien personnel est inaltérable, dans le capitalisme, le contrat qui lie l'employeur à l'employé est précaire.

Le suzerain avait des droits sur le vassal que l'employeur n'a plus - il pouvait déterminer avec qui il pouvait se marier ou le type d'activité qu'il devait exercer sur ses terres. L'employeur a moins de droits théoriques - il ne peut pas interférer avec la vie privée de l'employé mais, par la pression de l'aiguillon de la nécessité, par le fait qu'il détient en tant que propriétaire le monopole de la reconnaissance de la production de valeur économique, l'employeur se met souvent en situation de régir la vie privée de l'employé. Que l'on songe au plus vieux métier du monde, que l'on songe aux licenciements de femmes enceinte à travers le monde, que l'on songe enfin, aux cités dortoirs dans lesquels les travailleurs sont soigneusement séparés en fonction de leur origine en Chine actuellement et l'on se prend à comparer les droits du suzerain et ceux de l'employeur.

Mais l'employeur a des droits que le suzerain n'avait pas. En licenciant l'employé, il peut le condamner à la misère - ce que le suzerain protecteur ne pouvait pas faire à bon droit. L'employeur détermine l'activité de l'employé, ce qu'il va faire, quand, comment, avec qui, selon quelles modalités - le suzerain ne pouvait pas le faire.

Surtout, comme la qualification et le salaire sont liés au poste que l'employeur gère seul, l'employeur peut décider qui a produit de la valeur sociale et qui n'en produit pas, il peut embaucher, licencier, augmenter le salaire et la qualification ou, au contraire les diminuer.

L'employeur n'est tenu à aucun devoir envers l'employé alors que le suzerain devait protection au vassal et qu'il devait respecter la dignité de son rang.

Comme la relation suzerain-vassal, la relation employeur-employé demeure asymétrique: l'employeur a besoin de l'employé pour augmenter ses marges alors que l'employé a un besoin vital - faute de sombrer dans la misère noire - des revenus chichement octroyés avec l'emploi, du salaire.


  • Féodalité et politiques européennes

Les politiques européennes (que ce soit la coalition suicidoise en Belgique, l'impopulaire Hollande en France, l'Italie, l'Allemagne ...) entendent augmenter la pression de l'aiguillon de la nécessité sur les employés. Ce ne sont pas des politiques libérales, ce sont des politiques capitalistes-féodales. 

Elles font la guerre au salaire sans interruption depuis des décennies - ce qui a fini par plonger le continent dans la crise permanente et le menace maintenant du retour de la barbarie. Elles entendent dégrader les conditions de travail et diminuer les salaires socialisés, les retraites, les prestations de chômage:

- dérégulation du marché du travail
- diminution (et "activation", lire harcèlement) des prestations sociales
- travail forcé pour les chômeurs (le fait de ne pas avoir un emploi, de ne pas soumettre son activité au lucre de propriétaires, est considéré comme un crime passible des travaux forcés alors que les gens en dehors de la société féodale demeuraient pauvres mais libres, l'usage des communaux suffisait à leurs besoins)

- diminution des salaires (saut d'index)
- fiscalisation des salaires, aides aux actionnaires-employeurs

Ces politiques augmentent l'asservissement de l'employé envers ses employeurs. Elles dégradent le rapport de force au détriment de l'employé de sorte que l'emploi s'apparente toujours plus à du servage ... sauf que les serfs étaient libres d'organiser leur travail et que les seigneurs étaient contraints de devoir leur laisser à manger.