- Définition
La hiérarchie est un mode d'organisation inégalitaire. Le mot vient du grec hieros (ἱερός), sacré, et arkhè (ἀρχή), pouvoir, domination. Le supérieur hiérarchique est sacré, il donne des ordres auxquels l'inférieur hiérarchique obéit. L'inférieur va suivre les ordres, les intérêts de cette autre personne, ce supérieur 'sacré'.
Concrètement, le mode d'organisation hiérarchique est dit vertical, des subordonnés obéissent aux supérieurs en dépit d'intérêts individuels éventuellement opposés.
Ce système peut se multiplier à plusieurs échelles et constituer des organisations aux organigrammes complexes, à l'instar de l'armée, de l'Église ou de l'entreprise.
- Hiérarchie et emploi
Dans l'emploi, le mode d'organisation du travail est nécessairement hiérarchique. La propriété lucrative confère aux propriétaires un caractère sacré: ils commandent et leurs employés doivent obéir alors que leurs intérêts s'opposent.
Même si les travailleurs sont impliqués dans le processus de production, même s'ils jouissent d'une relative liberté de parole ou d'association, le contrat de travail en lui-même impose un lien de subordination.
La reconnaissance de ce lien a même été une victoire des travailleurs: dans la mesure où la hiérarchie impose des ordres, il faut que ce qui est accompli dans le cadre du travail soit de la responsabilité du donneur d'ordre et non de ceux qui l'accomplissent.
- Typologie (sommaire) de la hiérarchie
La hiérarchie peut être
- inexistante
Dans ce cas, il n'y a pas de violence sociale, c'est en tous cas une production économique (ou non) non capitaliste.- explicite
C'est le cas des sociétés patriarcales de l'ancien régime (ou ça peut l'être dans le cas de l'économie domestique). Les castes de naissance déterminent les droits et les devoirs spécifiques, elles déterminent la place spécifique dans la hiérarchie.
- implicite
Dans l'emploi, les contractants, l'employeur et l'employé sont égaux en droit mais, en fait, ils sont pris dans une situation hiérarchique asymétrique. L'employé est tenu par l'aiguillon de la nécessité, par la privatisation des ressources communes qui lui permettraient de vivre hors emploi alors que l'employeur est sûr de son capital et souhaite l'accumuler. L'employeur a tous les droits sur la production et sur l'outil de production alors que l'employé est "invité" chez quelqu'un d'autre dans l'usine, dans le bureau qu'il fait tourner lui-même.
Les pervers narcissiques utilisent également une hiérarchie implicite pour pallier les lacunes de leur moi. À l'instar des employeurs, ils peuvent être dangereux pour la santé physique et mentale de leurs "subordonnés".
- Hiérarchie et management
Dans tous les types de management, de gestion de la production, il importe de souligner que le travailleur ne maîtrise jamais les buts de la production dans le cadre de l'emploi et de la propriété lucrative. Il s'agit toujours de participer à l'accumulation du propriétaire (même si cela ne plaît pas aux travailleurs). Tout au plus, le travailleur est consulté sur certaines modalités pratiques d'organisation de la production.
Les décisions finales quant au travail concret, à ce qui se fait concrètement dans l'usine, au bureau (ou dans l'administration ou l'atelier) appartiennent toujours aux supérieurs hiérarchiques, les propriétaires - aussi incompétents soient-ils. Ils déterminent les objectifs de la production, le sens, le but.
Comme l'emploi utilise une hiérarchie implicite, il est difficile pour les travailleurs privés de voix au chapitre d'imaginer l'inimaginable: de s'octroyer le droit à maîtriser le travail concret et le travail abstrait, la violence sociale, la hiérarchie sociale dont ce travail est porteur.
Le management horizontal ne déroge en rien au principe hiérarchique de l'organisation du travail capitaliste: on a un supérieur (nommé N+1) qui se trouve, en prise directe, avec des subordonnés (nommés N) sans intermédiaires, en ligne hiérarchique directe. Si ce management permet des relations entre collègues de niveau N sans hiérarchie, il n'abolit en rien l'infériorisation des travailleurs dans les processus décisionnels, par rapport aux N+1 (voire aux N+2, N+3, etc.). Ce système s'apparente au petit patron paternaliste d'antan qui gérait directement les relations avec chacun de ses employés, sans contremaître.