Il désigne le fait de faire intégrer des horaires réguliers pour une activité à une bête ou à un humain. Pour traire ses vaches à heures fixes, le paysan devra les aheûrer.
Parmi toutes les violences de l'emploi, c'est sans doute la plus commune, la plus évidente: celle qu'il faut se lever à heure fixe, suivre un horaire préétabli, et ce, quel que soit l'état de santé ou l'humeur de l'employé.
Foucault a décrit le biopouvoir, l'intériorisation dans les corps et par les corps des contraintes des normes du pouvoir. L'heure, l'horaire sont des contraintes particulièrement violentes. Elles négligent les besoins, les aspirations, les désirs de ceux qui les subissent.
C'est la crèche, puis l'école, puis l'usine ou le bureau qui incarnent le temps 'aheûré', le temps sans lien avec les saisons, avec la santé, avec le désir.
Les 'aheûrés' se retrouvent ensemble dans les bouchons, dans les sandwicheries sans goût, dans les supermarchés le samedi.
Par ailleurs, en vieux français, aheurer existait. Il avait plusieurs acceptions (dans le F. Godefroy):
1. ajourner, fixer l'heure
2. placer à l'heure convenable ou fixer le temps convenable
Cette acception s'oppose franchement au sens pris en wallon dans l'acclimatation de la vie à l'heure puisqu'il s'agit ici de l'inverse, de l'acclimatation de l'heure à la vie.3. régler l'emploi de ses heures, faire les choses à heures régulières
Cette sens diffère du sens wallon. La régularité n'implique pas une adaptation du temps des activités à des impératifs temporels fixes. Nous ne voyons pas la régularité comme un problème en soi, c'est la violence des rythmes imposés, inadaptés aux cadences, aux désirs et aux besoins du corps qui pose problème.
4. régler un enfant, l'habituer à prendre ses repas à heures fixes - c'est le sens que nous avons développé en wallon.