La grève en elle-même est une initiative courageuse des producteurs. Elle leur demande de l'engagement, de l'idéalisme puisque, en faisant grève, les producteurs renoncent provisoirement au salaire, à l'argent dont ils ont impérativement besoin pour vivre une fois que les ressources communes ont été privatisées par enclosure. Les grévistes sont déchirés entre la justesse de leur engagement, leur idéalisme et la difficile pauvreté quand le salaire n'arrive plus.
L'entraide s'avère décisive dans la grève. Une grève soutenue permet aux grévistes de tenir la pression et d'obtenir de substantielles victoires.
La grève révèle que la richesse est créée par le travail et volée par les propriétaires lucratifs. Ces propriétaires subissent la pression du manque à gagner, ce manque à gagner est le signe du défaut de travail, du chômage voulu.
La grève révèle des formes de vie latentes, des façons de s'organiser en marge, aux limites de l'emploi, elle atteste la combativité, l'intelligence, la société des producteurs aussi prolétarisées que soient leurs tâches.
Une grève générale au niveau d'un ensemble économique (l'Europe, par exemple) au finish peut atteindre tous ses objectifs. La difficulté d'une telle action, aussi nécessaire soit-elle, réside dans la division des producteurs. Nous sommes divisés en salaires, en statuts, en législations sociales ou en intérêts locaux distincts voire en ethnies, en confession ou en affinités politiques.
Par ailleurs, des institutions de remise au travail, des briseurs institutionnels de grève sont légion. Certains syndicats, par exemple, affirment qu'il n'y a rien à faire (le fait de se le dire rend toute action impossible), que le rapport de force n'y est pas (les producteurs créent la richesse, ils sont susceptibles de s'emparer du pouvoir). Certains signent des capitulations félonnes, congédient les délégués les plus intègres, les plus courageux. Certains couvrent les actions les plus antisociales de directions réactionnaires dans un copinage malsain.
Les perdants de la duplicité des briseurs de grève sont les salariés les moins bien payés, les précaires, les chômeurs, les retraités. Les jaunes laissent les cotisations fondre depuis quarante ans sans faire le lien avec le salaire, les jaunes pratiquent un échangisme incestueux avec les partis de droite complexée (type PS), les jaunes ne défendent plus les innombrables syndiqués chômeurs, retraités, malades ou précaires qui n'ont pas voix au chapitre dans le concert de la société.
Les casseurs de grève sont complices de la casse sociale, de la déflation salariale qui bloque toute perspective d'avenir. Cette politique d'austérité mène droit au mur mais préserve les intérêts des propriétaires lucratifs tant qu'elle ne dépasse pas une certaine ampleur.
En dépit de l'inefficacité économique des politiques dont ils se font les complices, les casseurs de grève parlent toujours au nom de la raison. Ils prétendent qu'il n'y a pas d'alternative possible (TINA en anglais), ce qui est faux, ou que c'est ça ou l'extrême droite, ce qui est tout aussi faux. Fort heureusement, le champ politique, le champ économique ne se réduisent pas au fascisme ou à la collaboration de classe.
Contre les jaunes, la démocratie sociale et le droit sont des armes susceptibles d'être efficaces. En tout état de cause, il ne faut pas oublier que, selon Sun Tsu (L'Art de la guerre):
- la qualité morale, l'intégrité de la lutte, de ses généraux sera déterminante dans la victoire
- l'armée poussée à bout, aux derniers retranchements, l'armée qui doit défendre sa vie le fera avec une énergie du désespoir victorieuse
- le rapport de force économique est favorable aux producteurs (ils n'ont pas besoin d'investisseurs pour produire alors que les investisseurs ont besoin de producteur pour accumuler de la valeur), il faut le révéler en amenant l'ennemi sur un terrain où nous sommes assurés d'avoir la victoire. À ce titre, la grève est une stratégie de choix à condition d'en maîtriser le coût humain pour les grévistes.
- Liens
- la grève patronale (lock out)
- la grève perlée (voir ici)
est une succession concertée d'arrêts de travail de courte durée ou de ralentissements de l'activité d’une entreprise affectant sa production. Ce type d'action qui n'est pas une grève au sens de la loi est illégal en France.
- la grève du zèle (voir ici)
consiste à exécuter le travail en appliquant à la lettre tous les règlements, afin d'en ralentir le plus possible l’exécution.
En outre, par ailleurs, le site de la Toupie (ici) distingue ces types de grève:
- Une grève générale est une grève suivie par la grande majorité des travailleurs d'un pays autour des mêmes revendications principales.
- Une grève surprise est une grève sans dépôt préalable d'un préavis.
- Une grève sauvage est décidée directement par les salariés en dehors de toute consigne syndicale.
- Une grève tournante affecte successivement les différents ateliers d’une usine ou services d'une entreprise de telle sorte que les effectifs ne soient jamais au complet et que les pertes de salaire ne soient pas trop importantes.
- Une grève sur le tas ou grève avec occupation est une grève au cours de laquelle les grévistes occupent les lieux de travail.
- Une grève solidaire a pour objectif de soutenir, par solidarité, les revendications d'une autre catégorie de salariés.
- Une grève politique a pour objet la satisfaction des revendications non pas professionnelles, mais politiques et de faire pression sur les autorités du pays.
- Une grève de la faim est le refus prolongé de se nourrir afin d'attirer l’attention des autorités et de l’opinion publique sur une situation particulière ou sur une revendication.
- Un piquet de grève est un groupe de grévistes installés à l’entrée d’un lieu de travail dans le but d'en interdire l’accès aux salariés non grévistes.